jeudi 12 avril 2012

Que faire de la grand-mère...? 2/2

Ci-dessous la lettre du petit-fils par alliance d'Eléonore Dumanois à mon arrière grand-mère, également petite-fille par alliance avec Marcel VIARD, suite au décès de Léonie en 1932.


"Nancy, le 18 mars 1932,


Bonjour à toute la famille,


En plus des tourments que chacun endure chaque jour, d'autres ennuis s'ajoutent sans cesse car l'homme propose et Dieu dispose...
La mère Léonie est morte, celle qui devait partir reste infirme au lit à la charge de ses petits enfants - quoi dire - c'est ainsi, et le prendre comme tel et malgré tous ces ennuis soyons à notre Devoir en toute conscience, donnant l'exemple à nos enfants, acceptons le ainsi, puisque nous aussi nous serons ainsi un jour...


Les affaires ne vont pas à Nancy (Louis est inventeur de métier)  et partant je suis encore diminué. On ne sait où on va, et tous ces voyages Nancy Bouconville 50f tramway train autobus temps retenu et plus le logement et pension à payer aux faux frais en dehors de la famille à subvenir en plus.


Obligé s'être éloigné de ma famille, rentrer chaque soir dans un logis froid et seul depuis quatre mois bientôt d'hiver, j'en ai assez, j'ai maigri de 13 kilos, ça ne peut durer ainsi, il faut donc que je perde ma place et quitter Nancy ou bien que la grand-mère aille à l'hôpital, ce que ne voulait pas Léonie (sa fille).
J'ai demandé à mon parent le doyen chanoine de Saint Mihiel, il faudrait encore 12F par jour (parce que infirme au lit) en plus des secours de la ville, et la Loi (article 205 du code civil oblige à soigner grand-mère), 
faire vendre, il restera quoi?
avec la part de l'Etat - jugement de mineurs, jugement d'abandonnés, avec l'argent qu'on a pas
rien qu'un simple papier de donation de l'un et l'autre
La mère Léonie paya près de mille francs, soit 20% de la part de Charles (Charles Diot, 2ème mari de Léonie) estimée à mille puisque le tout estimé à dix mille à eux deux.


Cependant, il faut quand même assister grand-mère qui n'a que 90f par trimestre depuis peu pour ses blessures de guerre et 100f par an de son fils tué aux carrières, soit 38f par mois et un bon de pain de la commune (demander au maire ou à la préfecture).

En bousculant (avoués, Etat, notaires, le fisc) avec de l'argent, toujours de l'argent, j'ai appris qu'un arrangement loyal, honnête, entre nous pouvait être fait en me dévouant encore ; le voici expliqué:

Si avec mes 4 enfants, j'accepte et habite la maison et cultive moi-même au titre rural et artisanal l'Etat abandonne sa part! à condition que je me prête à ses conditions compliquées chaque année en faisant quelques frais - les autres enfants (dont mon arrière grand-mère)  se désistant en reversant sa part chacun pour signer grand-mère, la nourrir aux conditions suivantes.

Cette petite propriété avec maison vétuste est estimée dis mille francs le tout meubles et immeuble comme la Donation (c'est grandement estimé à cette heure où tout dégringole...)
Cette somme moins les frais notariés et autres seront donc pour soins et nourriture à grand-mère en chacun 40f par mois, comme indiqué au papier à seule fin de garder grand-mère à Bouconville, quoique peu intéressante par moment...
mais c'est un devoir qu'il faut comprendre, quoique gâtée par mère Léonie qui n'avait rien d'assez bon pour elle, se privant pour sa mère quand elle avait quelque chose de plaisant.

 
 La grand-mère a habité la ville plus de 40 années, habituée aux biftecks, au vin, elle boit du vin pour 30f par mois, sans le sucre avec, elle ne mange pas ou peu de laitage qui est bon et moins cher à la campagne, elle ne changera pas à son âge, elle est exigeante, veut faire de Gillette (Viard, sa petite-fille, épouse de Louis Farque) , comme pour sa fille Léonie.
Elle a 3 chats qui vont au lit, le salissant et des puces pour tout le monde ; mes enfants ne peuvent toucher les chats, ni sa vaisselle fendue, ni ses vieux bibelots ou ustensiles hors d'usage ou vermoulus, elle croit que la maison est à elle avec ce qui est dedans,
c'est donc des chinoiseries répétées puis dès que Gillette (la pauvre qui la soigne de son mieux) a le dos tourné, c'est pour dire du mal d'elle aux voisines et autres curieux, c'est le maire qui nous a prévenu de cela.


Je n'ai pas plus à accepter une telle charge que les autres et perdre ma place à Nancy, que faire à Bouconville tout d'abord? puis redéménager 650f que je n'ai pas ayant dépensé plus de 2000f depuis la maladie de mère Léonie et ma santé, et celle de Gillette qui n'est pas rétablie de ses nuits et jours à soigner la mère seule, ses 4 enfants et la mère Léonore.


J'avais été à Nancy pour que mes enfants soient plus instruits, plus compétents en suivant les cours gratuits à volonté, tout cela perdu, c'est une tuile, personne ne ferait cela!
si ce n'était un cas de conscience sans quoi soyez bien certains que bien vite je ramènerai Gillette et les enfants à nancy, laissant la vieille maison de mère Léonie qui voulait la donner à Gillette l'année passée pour la soigner sa vie durant. Gillette n'a pas voulu aimant mieux son nid à Nancy, que des ennuis de ses frères et soeurs et du surtravail.
je préférais qu'elle se débrouille avec sa mère, la grand mère léonore, je l'aidais de mon mieux lui envoyant 40 ou 50f par mois (elle me redevait 500f sur les mille francs que je lui avais prêté pour son acte "donation", pigeons et chèvres étaient à moi, puisque je lui avais envoyé 260f dont j'ai encore le papier talon.

Bref, de tout cela, j'aimerais mieux laisser l'Etat faire à sa guise et la grand-mère en charge à chacun 90f par mois comme le père Farque à ses enfants en obligeant même un récalcitrant sur ses gages par justice, moi je verse 45f seulement à cause de mes enfants, et je suis en liberté.

Prendre grand-mère exigeante et autoritaire est une tâche, un sacerdoce...
demandez au mire et à Madame Mathieu qui dans sa dernière visite, dit à Gillette: en aucun cas ne garde pas ta grand-mère que je connais, tu as des enfants, c'est ta mission, garder ta grand-mère, c'est au dessus de tes forces et de ton courage, ton foyer en patira avec toi-même...


Essayons de la garder comme le souhaitait mère Léonie, nous ne récolterons que ce que nous avons semé, montrons une fois de plus notre bonne volonté et peut être que les évènements nous récompenserons...


Lundi, je vais encore à St Mihiel pour ces actes, discuter avec tous ces voleurs, notaires et autres, et j'ai besoin par retour que vous signiez pour moi même avant que de faire les frais nécessaires, en signant le papier d'accord et renvoyé recommandé à Gillette en plaçant bien madame pour la recevoir du facteur de Bouconville;

En attendant des temps meilleurs par la pensée nous vous embrassons affectueusement."

LOUIS















3 commentaires:

  1. Passionnante tranche d'histoire familiale.
    Et finalement qu'est devenue Éléonore ?
    Jusqu'à quel âge vénérable a-t-elle vécu ?
    On a envie de connaître la suite...

    Tatiana

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  2. Je constate avec grand étonnement que cette lettre a été écrite par mon père : Louis Farque !!
    Quelle surprise !! MErci pour toutes ces informations partagées
    Il est décédé en 2011 à l'âge de 91 ans (un mois avant son 91ème anniversaire !!
    Sylvie Farque (Montagnon)

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  3. En relisant je me rend compte qu'en fait 'Louis' est mon grand père puisque la lettre est datée de 1932 (mon père avait donc 12 ans à l'époque) j'avais lu 1952 :-/ Mais alors je ne comprend pas pourquoi sur le livret de famille de mon père (seul document que j'ai en ma possession) il est mentionné comme prénom de son père : Emile Farque !! Je n'y comprend plus rien...

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