Le 17 juin 1852, un coup de feu retentit...
François GROSNARD est blessé!
Dans les montagnes de la province de Constantine en Algérie, François tombe face à une tribu locale.
Photo personnelle : dossier photographié au Service Historique de la Défense Cote GR 3 YF 88433 |
Dans un article précédent "G comme Grosnard François", j'avais évoqué cet ancêtre sur lequel la légende familiale disait que lors de la prise de Constantine, il avait eu sa mâchoire tranchée par un sabre! sabre, coup de feu...peu importe!
Je n'avais pas de documents attestant qu'il s'agissait bien de lui ou d'un de ses frères.
C'est en allant en juin dernier au Service Historique de la Défense à Vincennes que j'ai retrouvé par chance sa demande de pension qui faisait état de ses services au sein de l'armée.
Document riche en renseignement et qui m'en dit beaucoup sur cet ancêtre dont je cherchais depuis longtemps son parcours militaire.
En mai dernier, en recherchant sur le site internet du Service Historique de la Défense, je trouve la sous-série 3 Yf sur les dossiers de pensions militaires, en me disant que si mon ancêtre a été militaire, et qu'il a été blessé, il a forcément eu un dossier de pension.
Et là, bingo!
Le volume 6 de la série 3 Yf • Première série, 1817-1856 comporte en bas de la page 111, le nom de mon ancêtre:
La ligne qui lui est consacrée indique un numéro de dossier relatif à sa pension: 88.433 ; numéro que j'ai commandé et ai pu consulter le 14 juin dernier.
Son dossier comporte notamment:
- la justification de la blessure,
- un état des services,
- la demande motivée de pension,
- un extrait de son acte de naissance.
J'y apprends ainsi que François est rentré dans l'armée le 5 décembre 1843 au 68ème de ligne, à l'âge, donc de 21 ans.
Photo personnelle : dossier photographié au Service Historique de la Défense Cote GR 3 YF 88433 |
Ses états de service sont les suivants:
- entré au service au 68ème de ligne le 5 décembre 1843 comme remplaçant admis par le corps servant pour le sieur Lamotte Jean Alfred.
- Libéré le 31 décembre 1846.
- Rentré au service au 49ème de ligne le 25 février 1847 comme remplaçant admis par le Conseil de Révision servant pour le sieur Janvier Jean René de la classe de 1845, inscrit sous le N° 1071 de la liste du contingent du département de la Sarthe.
- 2 juin 1848, dirigé sur le 3ème bataillon d'Infanterie Légère d'Afrique.
Pourquoi François Grosnard a t-il rejoint le 3ème BILA?
L'infanterie légère d'Afrique avait été créée en juin 1832 pour recycler les militaires condamnés a des peines correctionnelles par la justice militaire, et des militaires sanctionnés par l'envoi dans les compagnies de discipline.
Les Bataillons d'Infanterie Légère d'Afrique (BILA) étaient des bataillons formant corps. Leurs soldats, souvent âgés, relevaient de 54 catégories judiciaires différentes, allant du délit de chasse ou de pêche à la tentative de meurtre. Dans leur plus grand nombre, les "joyeux" sont des hommes affranchis dont la destinée est extrêmement variée. Leur seul point commun est le casier judiciaire. Mais dans l ensemble, ils passent pour être extrêmement redoutables, non seulement pour les ennemis, mais aussi pour les troupes des autres corps.
Mon ancêtre était, en effet, par la "case" prison!
L'état de ses services mentionne que le 29 juin 1847, il a été condamné par le Conseil de Guerre à un an de prison pour dissipation d'effet d'armement.
Il fût cependant gracié du restant de sa peine par décision du Gouvernement provisoire le 9 mai 1848, et ainsi "recyclé" dans le 3ème BILA.
Les soldats des BILA s'illustrèrent du 2 au 6 février 1840 dans la défense de la redoute de Mazagran, assiégée par les troupes de Ben Thami, lieutenant d'Abd el-Kader. Ce jour devint la fête des BILA.
Le 3e Bataillon d’Infanterie Légère d’Afrique est créé le 20 juin 1833 à Alger, puis stationne à Bône. Il participe aux opérations de la Tafna, puis au second siège de Constantine (1837). On envoie le bataillon en Corse afin de préparer sa vente a l'Espagne, mais la transaction n'aboutit pas.
En 1841, le bataillon, qui a pu revenir en Algérie, est placé le 10 septembre sous les ordre du chef de bataillon Anne Joseph Théodore Peyssard, officier d'infanterie qui s'est déjà largement distingué sous les ordres du général Trezel durant l'expédition de Bougie.
Au 1er janvier 1849, le 3e BILA, sous le commandement du chef de bataillon Lenoir, est en garnison à Philippeville en Algérie.
Sa demande de pension militaire: une demande pour cause de blessures et d'infirmités
Photo personnelle : dossier photographié au Service Historique de la Défense Cote GR 3 YF 88433 |
Sa demande de pension est acceptée pour un montant de 293 Francs pour la raison médicale suivante: Perte de l'usage d'un membre.
Photo personnelle : dossier photographié au Service Historique de la Défense Cote GR 3 YF 88433 |
Suite au coup de feu dans le visage, François a eu :
- une ablation de 14 dents avec perte de substance des maxillaires,
- et une lésion de la langue avec gêne prononcée de la mastication et de la phonation.
Pour cette raison, sa pension était justifiée et François est ainsi devenu un retraité de l'armée.
Cette blessure, cette infirmité ne l'a pas empêché de se marier en 1854, après son retour dans la Meuse, et d'avoir 4 enfants.
Je suppose tout de même qu'il n'a pas dû être un mari et un père facile à vivre.
Quelle chance d'avoir trouvé tous ces documents ! Je ne suis pas encore allé aux archives de Vincennes car je ne sais pas qu'y trouver ni ce que je peux y chercher ... Mais il faudrait que je m'y penche à l'occasion. En tout cas, une preuve de plus que les vies de nos aïeux étaient pleines d'aventures et, parfois, d'exotisme !
RépondreSupprimerBelle recherche !
RépondreSupprimerQuel parcours ! Il fut une "gueule cassée", tous comme ceux de 14-18…
RépondreSupprimerTrès bel article. La commune du département de Constantine est peut-être Djebel-Kouif.
RépondreSupprimerTrès beau billet. J'adore la frise, quel outil utilises-tu? (je fais ma curieuse :) )
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